Gare centrale fait d’un lieu de transit un théâtre des passions et des marges. Dans le tumulte du Caire, il orchestre le heurt du rêve et de la misère, du fantasme d’amour et de la brutalité du monde. La gare devient un microcosme traversée de regards, de bruits, d’obsessions. En incarnant lui-même Kenaoui, vendeur de journaux infirme, Chahine signe un drame d’une grande audace, entre réalisme brûlant et vertige intérieur, entre fièvre du corps et chaos social. Gare centrale déploie le cinéma comme un espace de trouble, où l’élan vital révèle la violence du réel et où l’exclusion prend visage. Sous le fracas des trains on entend la pulsation d’un pays entier — celle d’une Égypte au seuil de sa modernité : incertaine, aussi fiévreuse que vacillante.
Jérôme Baron
Copie restaurée
