Macho Dancer

Lino Brocka livre avec Macho Dancer un film âpre et lucide. Suivant un jeune provincial contraint de vendre son corps à Manille, il dresse le portrait d’une société où le désir, la pauvreté et la corruption s’entrelacent jusqu’à l’épuisement moral. Derrière les lumières artificielles des clubs, Brocka révèle la mécanique d’un pouvoir qui réduit la survie à une économie du corps. Tourné peu après la chute de Marcos, alors que le cinéaste avait été à plusieurs reprises emprisonné pour ses prises de position politiques, le film prolonge son combat contre la censure et l’hypocrisie sociale. Macho Dancer n’est pas une descente complaisante dans les marges : c’est un geste de défi, un acte de cinéma qui expose, avec une clarté implacable, la violence et les douleurs d’un pays où perdure un système que l’élection démocratique de Cory Aquino ne parvient pas à enrayer.
Jérôme Baron