People Mountain People Sea
(Ren Shan Ren Hai)

Guizhou, Sud-Ouest de la Chine. Dès les premiers plans, ce deuxième longmétrage très maîtrisé pose un alliage paradoxal : la sérénité immuable
d’un paysage de montagne y est secouée par la violence mate, presque
sourde, d’un meurtre au couteau et en plein soleil. L’indifférence ambiante
et l’absurdité de ce geste crapuleux se traduisent par des plans souvent
larges là où on attendrait des plans rapprochés. Mais cette sécheresse
visuelle, accentuée par une image presque brûlée, n’est que la première des
surprises du récit. Quand Lao Tie, paisible paysan du cru, décide de venger la
victime – son frère–, le film offre une variation étourdissante sur la course poursuite, cette dynamique fondamentale du cinéma. Du compagnon
qui se propose de l’aider mais se révèle laminé par la toxicomanie à son ex-femme qu’il passe voir et brutalise comme si c’était normal, Lao Tie se révèle
de plus en plus agent d’une violence qu’il est supposé combattre. Au fur et
à mesure de sa traque, c’est la dévastation de tout un pays qui se fait jour,
des bicoques misérables où survit l’épouse avec son second fils à la mine du
Nord où l’assassin se serait fait embaucher. Police corrompue, travailleurs
écrasés dans les mines clandestines, vol généralisé… Cai Shangjun prolonge
avec virtuosité le portrait d’une Chine pulvérulente que Wang Bing a
entamé dans A l’Ouest des rails (Montgolfière d’or au F3C en 2003). CG